Trois paires d'yeux à l'entrée d'un tunnel

Texte et photos Théophile Barbu, 20 août 2018

A l’entrée d’un tunnel routier dans le 12^e arrondissement de Paris, sur un mur décati et noir de fumée, un artiste a pris le soin de dessiner des figures d’une rare délicatesse ! Un graph discret et stupéfiant offert à nous autres habitants.

Sortant du métro Bercy avec mon voisin, le jeune A., nous tombons sur un graph qui nous scotche sur place.

Trois personnages, yeux grand ouverts,
nous observent attentifs et vulnérables.

Des graphes et des peintures murales, nous en avons pourtant vus pas mal ce jour-là ! On avait en effet rendez-vous à la Mission locale, dans le 13^e. Et comme on était un peu en avance, on avait fait le tour du quartier pour contempler les fresques géantes qui ornent les immeubles autour de la station Nationale.

Au métro Nationale (Paris 13e), un voyageur chevauche un flamant rose,
des clés au bout des doigts.

Détails comiques

 A. avait beaucoup aimé une peinture faisant penser à de la BD fantastique (ci-dessus). Il avait attiré mon attention sur plusieurs détails très comiques, comme les clés au bout des doigts invraisemblables du voyageur à cheval sur un flamant rose.

J’avais de mon côté photographié une œuvre abstraite très belle, très dynamique, peinte (sans doute sans autorisation aucune) sur une armoire électrique ; cela ressemble à une sphère tournoyante, habitée par un fauve dont on ne devinerait que la fourrure tigrée.

Sur une armoire électrique ou de télécoms, une sphère habitée par un fauve.
Sur le trottoir, devant : la signature ?

Un air de lémuriens

Revenant dans notre quartier, c’est alors que nous tombons sur ce graphe d’une originalité stupéfiante : trois personnages d’allure animale, la tête cachée derrière un masque à gaz (ceux que mettent les grapheurs pour se protéger des émanations nocives des aérosols qu’ils utilisent). Un air de lémuriens, à moins que ce soit des «signes», on ne voit pas bien à cause du masque. Mais les personnages, eux, les yeux grand ouverts, observent tout ce qui se passe, très attentifs et certainement vulnérables.

Dans le tunnel, l'artiste, de grand talent, laisse en tout petit,
sa signature, indéchiffrable.

Don sans attente de retour

Nous restons longtemps admiratifs devant cette peinture : tant de travail, de précision, volontairement sacrifiés sur une des façades les plus déshéritées du tunnel. Peut-être une forme d’autoportrait, en tout cas, un don sans attente de retour, offert par un artiste de grand talent, un dessinateur qui laisse en tout petit, dans un coin de la façade grise, sa signature, indéchiffrable.

A vos clichés

Dans l’équipe du blog, nous sommes unanimes à trouver que les murs de notre arrondissement fourmillent de signes étonnants. C’est pourquoi nous ouvrons cette rubrique sur les inscriptions, peintures et dessins muraux.

Nous invitons tous ceux qu’une de ces créations spontanées (ou pas) a inspirés, à nous faire partager leurs impressions.

Théophile Barbu